Bossu

Jean Bossu (17 mai 1912 - 18 mai 1983)

Les frères Martel ont collaboré avec plusieurs architectes, outre Robert Mallet-Stevens et Jean Burkhalter, ce fut aussi le cas avec Jean Bossu.

L'architecte français Jean Bossu, est né le 17 mai 1912 à Nesles-la-Vallée (Val-d'Oise) et décédé le 18 mai 1983 dans le 6e arrondissement de Paris. Il est notamment connu pour son travail en Algérie et sur l'île de La Réunion, département d'outre-mer du sud-ouest de l'océan Indien où quatre des bâtiments qu'il a imaginés sont inscrits au titre des Monuments historiques.


Jean Bossu est aussi l’architecte des œuvres suivantes réalisées avec les frères Martel (*): 


- Le monument à la mémoire du peintre Charles Milcendeau à Challans (Vendée) 

- Le monument à la mémoire du Général Leclerc à Amiens (Somme)

- Le monument aux morts d'Aubigny-les-Clouzeaux (Vendée).

 

(*) Informations parues dans la revue : " Œuvres et maîtres d’œuvre, construction équipement, livraison n° 21, 5ème année, numéro spécial sur les monuments commémoratifs."

Leur dernier projet commun, celui d'une monumentale sculpture devant la mairie de Lille, ne verra pas le jour. Malheureusement Jan Martel décédera le mercredi 16 mars 1966, d'un accident de la route dans la voiture que conduisait son ami Jean Bossu, alors qu'il venaient de quitter cette ville.

Ce drame personnel est aussi incidemment un malheur professionnel : Jan Martel était le commanditaire à cette époque de l’opération « La Pinède » à Saint-Jean-de-Monts, en cours d’exécution.


L'acte de décès de Jan Martel (connu pour l'état civil avec ses prénoms Jean René), intervenu officiellement à Paris 16ème, à 23h30, dans la maison atelier du 10 rue Mallet-Stevens. L'accident a eu lieu à la sortie de Lille au premier embranchement sur l'autoroute A1. Dans cet accident de circulation, Lucienne Genevrey-Poirot, l'épouse de Jean Bossu sera blessée.

Entretien de Xavier Dousson avec Jean Préveral architecte, premier collaborateur de Jean Bossu à son domicile, rue de Châtillon, Paris 14ème, le lundi 14 avril 1997 : 


" L'épouse de Jean Préveral a rencontré Jean Bossu dans la rue, peu de temps après son accident de voiture qui a coûté la vie au sculpteur Jean Martel qui était son passager. Il en a parlé aussitôt à ma femme. D'après son témoignage, cet événement l'avait beaucoup marqué." 



Le chantier EAR 1425 (1942)


Le service des « Chantiers intellectuels et artistiques » lance une grande enquête sur l'architecture rurale qui reçoit le numéro 1425 et l’appellation de EAR, comme « enquête d’architecture rurale ». Ce chantier EAR 1425 est abrité par le musée des Arts et Traditions populaires (M.A.T.P.) de Georges-Henri Rivière.


L'année suivante, Jean Bossu est recruté pour participer à ce chantier. Pendant plus de 2 ans, l'architecte va réaliser des relevés en Vendée, Deux-Sèvres et Vienne.


Pour réaliser sa mission du chantier EAR 1425, Jean Bossu s'installe à Saint-Jean-de-Monts, en Vendée, avec l'architecte-ingénieur Jean Debarre et le sculpteur Jan Martel.



Extrait d’une planche d’analyse du " Prélèvement Vendée, Deux-Sèvres et Vienne ", dans le n° “ Techniques locales ” spécial Chantier 1425, Techniques & architecture, 1943, n° 11-12, p. 282 (auteur : Jean Bossu). Capa

 

Le Monument à Charles Milcendeau (1947)

On trouve une première collaboration entre les frères Martel et l'architecte Jean Bossu, pour la réalisation d'un monument commémoratif à Charles Milcendeau à Challans.




Le monument aux morts d'Aubigny-les-Clouzeaux (1947)



Le monument au Général Leclerc à Amiens (1950)

Rénovation du Moulin des Rivières (1960)

Jan Martel participe à la rénovation du Moulin des Rivières, la propriété du journaliste à Paris-Match puis au Figaro Jean Raymond Tournoux, avec un autre ami l'architecte Jean Bossu.


Projet pour le front de mer de Saint Jean de Monts (1963)

Dérivé de la maquette pour la Fontaine des Ciments français, la sculpture des Oiseaux de mer, réalisée par les frères Martel, qui orne l'Esplanade de la mer à Saint Jean de Monts, se situe dans un projet plus global d'architecture balnéaire avec différents scénarios pour l'aménagement du front de mer avec leur ami Jean Bossu.



La Résidence La Pinède (1964)

Jan Martel qui était propriétaire d'un terrain à St Jean de Monts fera appel, en 1964, à son ami architecte Jean Bossu pour la construction de la résidence la Pinède, au lieu-dit " Les Dix écus ".



Nous empruntons à Xavier Dousson les passages. suivants, extraits de sa thèse du 25 mars 2010 : 

D'autres accidents


Entre 1973 et 1983, une succession de drames se produit dans la vie de l’architecte. Le 15 mars 1977, il est à nouveau victime d’un accident de la route qui le laisse brièvement sans connaissance et nécessite, le 19 mars suivant, une intervention chirurgicale à la hanche. Surtout, dans l’automobile qu’il conduisait se trouvait une passagère, collaboratrice réunionnaise de l’architecte, Marie-Paule Sellaye, qui décède quelques heures plus tard des suites d’un traumatisme crânien. Cette disparition violente accable durablement Jean Bossu. L’année suivante, autre disparition tragique, son épouse (dont il était séparé) décède.


L’événement le plus violent pour sa carrière d’architecte se produit néanmoins deux ans plus tard en Algérie, sur les lieux mêmes de la réalisation de son projet le plus fameux, le Centre commercial Saint-Réparatus. Le 10 octobre 1980, à 13h27, un séisme ravage à nouveau la vallée du Chéliff, détruisant une grande partie de la ville d'Orléansville, qui avait pris depuis l'Indépendance son ancien nom d'El Asnam, et de nombreux villages alentours ; causant la mort de près 4 000 personnes, faisant 17 000 blessés et 460 000 sans-abri. La violence du séisme n'épargne pas les constructions de Bossu.



Carte postale du Centre Commercial de Saint Reparatus Orléansville Algérie

Un architecte méconnu

Au printemps 1983, l’architecte français Jean Bossu disparaît inopinément, victime d’un arrêt du cœur, presque oublié de ses confrères professionnels, inconnu du grand public, perclus de dettes. 


Né peu avant la première guerre mondiale, Jean Bossu a pourtant eu un parcours professionnel étincelant. Collaborateur précoce de Le Corbusier et Pierre Jeanneret dans l’entre-deux guerres, membre des CIAM dès 1933, reconstructeur original après la Libération, inventeur de typologies architecturales et de solutions constructives, il a multiplié les propositions singulières, depuis l’échelle du mobilier jusqu’à celle de l’urbanisme et de l’aménagement du territoire, enchaîné les chantiers outre-mer (Algérie, La Réunion) et participé aux débats architecturaux de son temps. 


Ce parcours atypique, étayé par une expression architecturale toute personnelle, lui a ouvert à plusieurs reprises les colonnes des revues d’architecture - tant pour ses réalisations que pour ses propositions plus théoriques et spéculatives - et permis d’attirer sur lui l’attention de plusieurs jeunes étudiants architectes. Il est ainsi devenu le « patron » d’un des ateliers extérieurs d’architecture de l’École des Beaux-Arts au milieu des années soixante (1964) avant de se retrouver le fondateur d’une Unité pédagogique d’architecture après Mai 1968, l’U.P. 5.


De son vivant, Jean Bossu a donc joui d’une reconnaissance personnelle, si ce n’est d’une certaine aura professionnelle, liée en particulier à ses positions critiques vis-à-vis de la modernité architecturale telle qu’elle s’est diffusée en France durant les années de Reconstruction et de croissance économique (1945-1975). Cette reconnaissance s’est pourtant très vite affaiblie, dès avant même sa disparition, au point que, le moment venu, son décès se produise « sans bruit », pour reprendre les mots de son seul nécrologue.


Contrairement à beaucoup de ses confrères français ou étrangers, Jean Bossu n’a pas organisé sa postérité, ni sur le plan matériel, ni sur celui des idées ou de la production architecturale, encore moins sur celui de la biographie.



L'atelier de Jean Bossu en 1955, rue Vavin


L'Artère Résidentielle

Notice biographique


Jean Bossu est né à Nesles-la-Vallée (Val-d’Oise) le 17 mai 1912 et décédé, le lendemain de ses 71 ans, le 18 mai 1983.

 

Fils cadet d’un couple d’artistes, il entre très jeune à l’école des Arts appliqués puis à l’école des Arts décoratifs, de 1927 à 1929.

 

Il rejoint l'atelier Le Corbusier, qui le considère comme l’un de ses meilleurs élèves, et y reste quatre ans : il dessine notamment les " grecques " du plan Voisin, participe aux projets du Centrosoyouz, de la Cité du refuge de l’Armée du salut, du concours pour le palais des Soviets à Moscou, aux projets d’urbanisme pour Alger et Nemours, à l’étude de la Ville radieuse.

 

En 1932 il participe à l’exposition de l’UAM (meubles, projet urbain " Refaire les poumons de Paris ", maison au bord d’un lac).

 

Il multiplie les stages chez les grands architectes (Chareau, Nelson, Mallet-Stevens, Roux-Spitz), passe deux ans chez Perret de 1933 à 1935. Les événements l'amènent ensuite à voyager : il travaille à Moscou auprès d'André Lurçat, puis, en 1938, part faire des relevés pour Le Corbusier en Algérie, dans la vallée du M’zab, et plus spécialement à Ghardaïa. Pendant la Seconde Guerre mondiale, il participe aux enquêtes du musée des Arts et traditions populaires avec Charles-Henri Rivière et Urbain Cassan. Cette enquête et la découverte de Ghardaïa marquent profondément son parcours architectural, qui prend à partir de la Reconstruction un tour singulier, l’éloignant progressivement des dogmes modernes.

 

Diplômé de l'Institut d'urbanisme de Paris en 1942, architecte du ministère de la Reconstruction et de l’urbanisme pour la Loire-Atlantique, Bossu participe à la Reconstruction, notamment aux côtés de Paul Dufournet (village témoin du Bosquel et cité des cheminots de Tergnier).

 

A partir de 1950, il construit de nombreux logements et équipements à Madagascar, aux Comores et à La Réunion.

 

Gérald Hanning l'introduit auprès de l'administration algérienne, pour laquelle il réalise ses œuvres majeures, notamment la reconstruction d’Orléansville (El Asnam) ravagée par un tremblement de terre en 1954 (la ville est à nouveau détruite en 1980).

 

Avec des projets théoriques comme celui de l’Artère résidentielle (1960-1966), véritable invention typologique où il propose le redoublement de la barre corbuséenne pour constituer entre deux un espace fortement urbain – réconciliation de la Cité radieuse et de la rue –, et des réalisations comme la préfecture de Tiaret (1966-1970) ou l’immeuble des Domaines à Alger (1969-1973), Bossu s’affirme comme un architecte qui aurait pu incarner sur la scène architecturale une modernité plus subtile, éminemment urbaine.

 

A son retour en France, il est nommé architecte en chef de la ZUP de Fleury-les-Aubrais (Loiret). Il mène ensuite quelques projets au Maroc et à Djibouti.

 

Il enseigne de 1964 à 1972, à la suite de la démission de Marcel Lods (atelier extérieur de l’ENSBA, rue Jacques-Callot qu'il partage avec l'ingénieur Miroslav Kostanjévac).

 

Il est aussi membre fondateur d'UP5, en 1968, avec G.-H. Pingusson et François Bigot.

 

Son associé Fabien Vienne, qui monte en 1950 l'agence Bossu agence de La Réunion, ouvre ultérieurement une agence propre dont les archives sont également déposées à l'IFA.